Certains mettent en opposition le "fait" et la "croyance". Or, en ce qui concerne la formation de l'identité, il n'y a jamais de "faits". Que des "croyances" qui en résultent.
Ce qui importe quand on se forge son identité, et quand on la poli tout au long de sa vie, ce n'est pas les évènement qu'on vit. C'est la manière dont on les vit. La manière dont on les interprète. La manière dont ils agissent sur notre vie.
Or le cerveau humain est fait pour croire à un monde abstrait, un monde issu de ses pensées, un monde issu de ses croyance. Ne place-t-on pas la date d'apparition de l'espèce humaine moderne, à la date de découverte des premières tombes ? Ces tombes sont directement liées à la croyance en la survivance de l'âme. Une croyance ésotérique.
C'est cette croyance qui différencie l'humain de l'animal.
Parce que nous sommes capables de formuler des croyances ésotériques, nous avons un cerveau humain. Parce que nous sommes capables de dire "je suis [insérez ici votre espèce]", parce que nous le formulons de la manière "j'ai l'âme d'un.e [insérez ici votre espèce]", cela veut dire que notre cerveau est humain.
Renier ce fait, c'est renier tout ce qui fait que l'être humain est devenu un être humain. C'est renier les fondements mêmes de la structure du cerveau humain.
D'autre part, la croyance n'est pas forcément une croyance religieuse. "Je réussis dans la vie si j'ai un travail qui paye bien" est une croyance psychologique. "Je suis un blaireau parce que je me comporte de telle ou telle façon" est une autre croyance psychologique.
Ces croyances psychologiques sont importantes parce que ce sont justement des croyances. Une fois décortiquées et rejetées parce que ce sont "juste des croyances", elles perdent leur intérêt dans la construction de l'identité. C'est un morceau de soi qui s'effondre.
Ce n'est pas fondamentalement mauvais quand on se débarrasse ainsi de croyances négatives du style "Je suis coupable de l'agression dont j'ai été victime". Mais ça devient dramatique quand la croyance psychologique qu'on repousse ainsi fait partie de l'échafaudage fragile qu'est la construction identitaire.
Quand, en prime, c'est une des croyances qui maintient la personne en vie, le résultat est tout bonnement catastrophique.
Je vais me prendre pour exemple. L'une des croyances psychologiques qui m'ont maintenues en vie c'est "Je suis une licorne venue sur Terre avec une mission à remplir". M'accrocher au but de cette mission, qu'elle soit réelle (point de vue ésotérique) ou une construction de mon esprit (point de vue psychologique), me permet au quotidien de faire abstraction des difficultés pour me concentrer uniquement sur "rester en vie" "rester en bonne santé" "continuer à m'accrocher" "faire face à la difficulté". Retirez-moi cette croyance psychologique, retirez-moi cette mission, et c'est tout mon être qui s'effondre, car ma raison de continuer à vivre s'est construite sur cet élément.
Revenons à la relation entre le cerveau humain dans sa structure et son fonctionnement, et l'ésotérisme.
Les pratiques ésotériques auxquelles les otherkins et therians font souvent appel sont du type voyage astral, transe, vision extatique, bref, tout ce qui permet de rentrer en contact avec "son vrai soi" ou "son vrai plan d'origine" ou "ses guides" etc.
La psychologie explique de mieux ne mieux les mécanismes du cerveau qui sont mis en jeu dans ces moments-là. Est-ce une raison pour repousser ces techniques ésotériques dans la construction de l'identité non-humaine ?
NON, BIEN AU CONTRAIRE !
La psychologie nous montre que toutes ces pratiques ésotériques nous permettent de rentrer en contact avec nous-mêmes. D'explorer notre inconscient. De nous parler à nous-même. De nous rassurer nous-même. La médecine nous montre que cela permet de baisser la pression artérielle, de soigner les symptômes dépressifs et dissociatifs.
Ce n'est pas très différent de ressentir et bouger ses membres fantômes. Le but de la manoeuvre est de faire du bien au moral, se sentir mieux, s'accrocher à quelque chose de positif, aller à la rencontre de soi-même.
Alors, d'un point de vue ésotérique, ce "monde intérieur" est à l'extérieur. Parce que le cerveau humain est programmé pour fonctionner dans le sens de cette croyance à l'ésotérisme et à un monde meilleur. Parce que c'est comme ça que le cerveau humain est censé fonctionner. Parce que c'est en s'accrochant à ces croyances que le cerveau humain fait avancer la machine. Parce que cela donne un sens, une direction, à sa vie.
Alors, d'un point de vue ésotérique, ces parties monstrueuses de nous mêmes que nous affrontons en voyage astral, sont réelles et extérieures à nous. D'un point de vue ésotérique, ces guides que nous rencontrons sont des entités séparées et non des morceaux de notre psychée.
Ce n'est pas grave d'y croire, du moment qu'on se comporte de manière fonctionnelle dans la société.
L'important est d'utiliser ces croyances psychologiques comme tremplin pour se sentir mieux, et mieux se connaître soi-même.
Les balayer sous prétexte que ce ne sont "que des croyances" c'est saper les fondations mêmes du psychisme humain.